top of page

Les marins du mois

                                                                       L  â€™hiver tarde à se retirer en France,  mais la pantomime suggestive du redoux a  fait bourgeonner notre second                                                                                   numéro de Maison à Voiles.


           Nous venons de quitter René, notre Marin de Mars, qu’on imagine parti en guerre contre son pilote automatique tombé en rade, entre Rio Dulce et les San Blas. Quarante heures vissé  à la barre, par une  mer assez formée, nous a-t-il rapporté, tout juste remis de sa fatigue. Chapeau le septuagénaire !


Au détour des forums nautiques, nous avons fait la  connaissance de Christian Mazade, qui a eu la gentillesse d’accepter notre invitation du mois d’avril.


Christian n’est pas une moitié de marin : voilà ma première impression, à la lecture de la -pourtant très modeste- présentation que je reçois de lui, par mail.  Quarante ans de navigation, dont vingt professionnelles : achats, ventes de bateaux, expertises, convoyages, réparations, et constructions.
J’ignore encore si la profession a fini par rassasier son appétit de la navigation... Mais il n’est pas improbable qu’elle ait nourri et révélé ce que Christian nous confie avoir été une « passion refoulée » jusqu’à présent : l’écriture.

Ce présent, pour Christian et son épouse, s’esquisse à bord d’un Voyage 12,50*, sur fond de retraite en eaux  brésiliennes… Conditions d’évidence fertiles à l’assouvissement des penchants, et aux regards intérieurs : Christian édite ce mois-ci son premier ouvrage* !

Christian et Marie Jo​

 

Non. Pour l’instant, non ! Mais je dois remettre un peu d’ordre dans notre discussion. Le voyage au Brésil  a été effectué avec un autre bateau, un Endurance 44. Un des plus beaux bateaux de voyage que nous ayons eu la chance de posséder. 

Peter Ibold, l’architecte, a pondu ce plan qui, je le pense, restera dans la mémoire du patrimoine nautique. Lors d’un déplacement professionnel, j’ai découvert cette coque nue pontée. Elle avait été abandonnée par ses deux précédents propriétaires. Tout était à faire ou à refaire. Achat en octobre 2004 et mise à l’eau en avril 2005 ! Six mois de travail acharné.



La vente du cabinet, et départ pour le Brésil en juillet 2007 après une belle fête. Cette étape de notre vie et le voyage vers Jao Pessoa font l’objet d’un livre qui ne tire plus des bords dans ma tête, mais qui se peaufine tous les jours.

Le Brésil ! Quand on amarre  Jadoune  au ponton de la marina de Jacaré, on se retrouve… Ailleurs. Dix-sept jours de traversée depuis Praïa au Cap Vert, et c’est un dépaysement total. Enfin pas total, total, le propriétaire de la marina  c’est Philippe.

​

Philippe écrivait des articles de fond dans Loisirs Nautiques, une revue destinée aux constructeurs amateurs, candidats aux voyages.

Autant dire que la rencontre fût spectaculaire. C’est avec Philippe que j’ai appris à confectionner du pastis à base de vodka. Pour info, la vodka ne titre que 35° d’alcool environ, et le 1 pour 5 préconisé par notre pastisseur-producteur national, s’avère ne pas être suffisant. Il devient alors nécessaire de tester, tester et re-tester encore afin de trouver le dosage qui convient.

Autant dire que les premières soirées Brésiliennes furent animées.



Et puis survint Miguélito. Un autre pigeon voyageur de passage. Miguélito, sur son CNSO de 10 mètres, parcourt l’Atlantique depuis une vingtaine d’années. Des côtes Africaines au Vénézuela, il promène sa guitare de gitan. En juillet et aout, il sévit sur les terrasses des Saintes Maries de la Mer, accompagné de sa danseuse flamenco, la célèbre Joce. Allez-y ! 1°) ça vaut le détour et 2°) vous ferez œuvre de charité, ça l’aide à financer leurs neuf ou dix mois de navigation.

Mais le Brésil… Si on occulte les grandes métropoles, c’est un pays formidable. Pas qu’il y ait une crainte quelconque, mais des buildings, ça reste des buildings ! Par contre les petits ports de pêcheurs, les criques, les îles d’Isla Grande, Paraty et tout un tas de mouillages que mon ami Jean (rencontré là-bas) m’a formellement interdit de dévoiler, resteront dans ma mémoire comme de merveilleux souvenirs.

Aujourd’hui, nous naviguons entre ​l’Espagne et le Portugal. Pour être plus précis entre l’Andalousie Atlantique et l’Algarve.

Notre nouveau voilier, un Jeanneau Voyage 12.50, n’a pas les avantages d’un bateau construit par soi et pour soi. Mais bon, c’est un bon bateau et c’est le meilleur moyen d’aller d’un endroit où on ne fait pas grand-chose à un coin où on n’en fera pas plus.

C’était quoi la question déjà ? Ah oui ! Si j’ai prévu un retour en France ? Ben non ! Pas pour l’instant. Et puis pour aller où ? Nous n’avons pas de maison. Tant que le physique naviguera de conserve avec le mental, je garderai un voilier. Puis quand il me sera devenu pénible de tirer sur les ficelles, j’opterai pour un bateau à moteur. Et quand vraiment, vraiment, vraiment il ne sera plus possible de vivre sur l’eau à bord d’un bateau… Hé bé tiens… J’en sais rien…mais alors rien du tout !

 

Certains soirs, assis à la table à carte, le bateau tirant doucement sur son mouillage, je me demande comment j’en suis arrivé là. En fait, tout petit, je n’avais pour seul but que la reconnaissance de mes petits camarades. Comme je n’étais pas le plus grand ni le plus costaud, j’ai décidé de les faire rire.

Par mes imitations d’instituteurs, ou mes rédacs que mes maîtres se faisaient une joie de lire devant tout le monde, espérant m’humilier. En ces temps-là, les classes étaient mixtes, et ces émules de Socrate -qui n’allaient pourtant pas pousser leur vocation jusqu’au sacrifice suprême-, pensaient qu’ils réduiraient mes ardeurs « d’écrivain déjà satirique», en me faisant moquer par la moitié juvénile féminine de la classe ! C’était sans compter sur mes espiègleries récréationnesques qui ramenaient mon public féminin, un temps perdu durant les cours.

Plus tard, l’armée me donna l’occasion de faire rire de nombreux camarades. Ce sujet aurait pu faire l’objet d’un nouveau livre, mais l’abandon du service militaire obligatoire, a tout simplement rayé d’un trait de stylo Bic toute envie de rigolade sur un sujet que plus personne ne comprend, à part les plus de quarante ans comme aurait pu le chanter Aznavour.

Merci, cher Christian, d’avoir accepté notre invitation du printemps sur les pages web de notre Maison à voiles.

Votre actualité nous offre un excellent sujet d’introduction à cet entretien ! Acceptez-vous de nous parler de votre première publication ? Est-elle le repaire de toutes vos impressions et expériences nautiques, ou, au contraire, le reflet de certaines méditations, que votre quotidien marin vous a sans doute offert de vivre ?

Une carrière s’ouvrait à moi ! Pour mon bonheur, la nécessité de gagner des sous me conduisit, non pas dans une école du rire mais dans la vente de voitures d’occasions. Hé oui, je sais, ce n’est pas pareil. Pourtant si vous saviez comme c’était désopilant de vendre des autos dans les années 70 ! Bien sûr la vie était plus douce, il y avait du travail pour tous, enfin ceux qui voulaient, et tous les jours, j’arrivais au boulot en chantant. Là aussi il y aurait matière à bouquin ! Mais les éventuels acheteurs de ce livre sont entrés dans le 4ème âge et préfèrent suivre les chiffres et les lettres à la télévision. Les marchands d’autos d’occasions sont plus nombreux que les clients, et le commerce automobile actuel n’amuse plus personne.

Dans les 20 dernières années nécessaires à l’obtention d’une pension de retraite bien méritée, j’œuvrais dans le nautisme. L’auto ne m’amusant plus vraiment, je me suis destiné à ma passion : la voile. Je me suis beaucoup amusé dans ce milieu. En plus j’y ai rencontré des gens formidables. Rassurez-vous, il y avait aussi des cons. Mais ça…



Sur le nautisme il y aura certainement matière à écrire. On verra…
La retraite venue, nous sommes partis sur notre bateau et nous avons alimenté nos amis de chroniques diverses. Ah, les amis. Non seulement, ils rigolaient de mes écrits, mais ils en redemandaient. Certains même allaient jusqu’à vouloir que j’écrive un livre.
Un soir ou l’insomnie et certainement un abus de liquide provenant de la fermentation de fruits rouges aidant, je me lançais dans l’écriture de La Vie de Jésus. Quelle entreprise ! Un des plus célèbres personnages des 21 derniers siècles ! Les plus grands avaient déjà tellement usés leurs plumes sur le rejeton de Marie, que la seule option qui s’offrait à moi, était d’en rire. Ce que je fis.

Nous avons beaucoup d’amis. Des rencontres de mouillage dans un pays lointain, des relations de travail, et, il faut bien le dire pas mal de clients heureux. Aussi, j’ai envoyé à tous quelques chapitres de La Vie de Jésus, et à cause d’eux, enfin non, grâce à eux, j’ai soumis à tout hasard le manuscrit à deux éditeurs. Le premier n’a pas aimé, l’autre l’a lu. Le second m’édite !
 

Et le rire se prolonge sur les forums nautiques ! Etonnant contraste avec le sujet de votre premier ouvrage. Dans l’imaginaire collectif, Jésus n’apparaît pas comme un gai-luron… En revanche, il reste pour tous le vecteur d’un vaste symbolisme aquatique ! Revenons à l’eau, si vous le voulez bien… et plus précisément celles du  Brésil, que vous découvrez à bord de votre Voyage.

Y a-t-il un retour à terre programmé ?

Un pied-à-terre qui attend votre retour ?

bottom of page